jeudi 8 mars 2007

Inter-minable


je repensais à ce mot de gaspard concernant le blog, interminable il disait et il y avait bien sûr une petite touche d'ironie, bon à peine, parce qu'en même temps on ne se connaît pas encore assez pour faire de l'ironie, juste assez pour se dire comme ça "ton blog interminable" et moi pour lui dire, pour te dire "mais tu ne voulais pas faire des films?" et du coup bien sûr la question fondamentale mais avant d'y venir juste une précision pour toi et pour eux, non, non, le blog n'est pas interminable, il se terminera et je peux même te dire quand je ne peux juste pas te donner encore la date précise, juste te dire qu'il se terminera exactement la veille du premier jour de tournage de ce film comment s'appelle-t-il déjà c'est quoi le titre ah oui, la troisième partie de comment déjà j'ai oublié, j'oublie tant de choses en ce moment c'est à cause de la quantité phénoménale de choses auxquelles je pense, auxquelles je m'efforce de penser, auxquelles je pense que je dois penser parce que je suis bordel je suis un réalisateur je vais tourner mon premier long-métrage dans quelques mois je suis un réalisateur tu veux une preuve je te la donne tiens regarde mon beau diplôme je suis arrivé à paris en 1998 après des études moyennes de science politique (mais enfin le diplôme ils me l'ont quand même donné n'est-ce pas?) de toute façon ce que je voulais faire c'était du cinéma et ici dans ce pays ça se passe ainsi quand tu veux faire du cinéma enfin pas forcément comme ça mais c'est une solution parmi d'autres ici donc tu peux aller à l'école et apprendre et ainsi obtenir un diplôme qui dit que tu as la permission de faire du cinéma alors c'est ce que j'ai fait, monsieur j'ai passé le concours il était dur, enfin dur pour les nerf surtout parce que franchement ce qu'on demande à ce concours c'est quand même de la petite bière à côté des concours de science politique (et j'ai pas passé les plus durs) et ensuite on m'a mis dans une petite classe pleine de gens très méchants avec qui je devais faire des petits films ridicules et mignons

(excusez-moi je disais bonne nuit à ma mère)

et puis j'ai fait d'autres films et mangé dans des cantines dégueu et de temps en temps à peu près deux ou trois fois par an je m'installais dans une salle de cinéma où on regardait tous ensemble les films qu'on avait faits et ensuite les lumières se rallumaient et d'autres gens très méchants nous disaient qu'on était des grosses merdes infâmes et comme on sentait bien que c'était vrai on en rigolait entre nous mais on sentait que c'était une vérité qui s'énonçait alors, on était des merdes infâmes, on ne savait rien et je me souviens que je m'interrogeais sur la valeur pédagogique des coups dans la gueule mais quand même c'était bon de voir des gens qu'on n'aimait pas se faire dérouiller ainsi en public bien sûr c'était moins drôle quand c'était ton tour mais ça fait partie du jeu, surtout qu'après on m'a bien récompensé de tous ces coups qu'on m'avait refilés on m'a donné un diplôme assorti des félicitations du jury et franchement mes parents étaient super fiers et moi aussi tu penses bien et surtout j'avais gagné ça, l'autorisation, la permission de faire des films et j'étais le roi du monde, t'imagines, bien sûr j'étais encore à cent lieues de la moindre question de cinéma mais qu'est-ce qu'on en a à foutre, depuis quand on est là pour se poser des questions (de cinéma ou d'autre chose) et alors après plus rien, enfin si des trucs mais rien qui mérite d'être réconté, et puis des gens aussi, mais là non plus rien qui mérite d'être raconté, ah ah, non, vraiment pas, ah ah, excuse-moi c'est nerveux, et ensuite quoi hop, et hop, et enfin un film pour se remettre en jambes, un deux, la boxe c'est loin maintenant, il faudrait que je m'y remette, allez hop, un peu de vélo, et un festival, souvenir d'autres festivals, méchants, méchants partout, mais je m'embrouille je te prie de m'excuser si la syntaxe devient chaotique mais c'est juste qu'on s'approche de la fin, et nous voilà à quelques mois de ça de ce moment et je suis là tout transi tout inquiet comme un misérable mais nom de nom si tu savais les grandes choses qu'il y a dedans, j'aimerais bien te dire, à l'intérieur de moi, rien à voir avec ce que tu vois, rien à voir avec cette inquiétude, dedans je suis bigger than life, ma vieille, tu vois, souviens-toi james mason chez nicholas ray, bigger than life, je te dis, je suis beau, si tu savais, dedans comme je suis beau et plein d'idées, ma vieille, plein de vraies questions pas du tout oiseuses, non, non attendez messieurs dames, ne sortez pas de la salle j'en ai encore sous le pied je peux encore pédaler un peu, encore un peu, la pente, je vais me la faire, ah ah, je l'attaque en danseuse, aha ah, vaillant, petit prince etc.

merci de m'avoir lu et bonne nuit à tous.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

bon là j'ai quasi pleuré
je m'identifie à fond
c'est ce que tous les gens qui essaient de machiner des trucs créatifs devraient avoir le courage de dire
au lieu de ça ils disent qu'ils écrivent des films en deux minutes
ils ne disent pas de quoi est faite la texture de ce chien de métier
de cette caverne lugubre qui s'éclaire de temps en temps (houla il est super moche ce lustre de grand-maman faudra que j'en change quand j'aurais les moyens)
alors bravo à toi d'avoir le courage de dire ça publiquement
parce que ça c'est ce qui se passe tous les jours dans nos têtes
même celles de ceux qui mentent et qui friment